Le Tonkin en
1886.
Le Tonkin en 1886.
Haï-Phong et la Baie d’Along.
La question du port du
Tonkin s’agitait vivement en 1886 et beaucoup plus tard encore on balançait sur
le point de savoir si l’on continuerait à s’enliser dans les marécages de Haï-Phong où, à défaut de connaissance de la côte, nous
étions venus opérer nos débarquements au commencement de l’expédition, attirés
uniquement par l’embouchure du Fleuve Rouge considéré comme grande voie de
communication vers l’intérieur. On a renoncé à faire de celui-ci une voie
navigable pratique, mais on a persisté à creuser un port dans cette terre en
formation qui prolonge le Delta de plusieurs dizaines de lieues sous-marines.
Pourtant on était fixé sur
la valeur de Haï-Phong qui n’offre même pas un abri
contre les coups de vent terribles de ces parages. J’ai assisté en 1887, et le
fait s’est reproduit souvent depuis, au spectacle des canonnières et des
vapeurs mouillant toutes leurs ancres, se mettant en avant à toute vapeur
contre le courant et se trouvant ramenés en arrière dans le fleuve, échoués sur
ses vases.
Mais, sous prétexte de
ménager les intérêts de quelques mercantis, surtout marchands de conserves et
d’absinthe suivant l’expédition, et alors qu’aucun intérêt commercial n’était encore
engagé, on s’enfonça de plus en plus à Haï-Phong, qui
n’était même pas une place annamite. Les navires de quelque tonnage allaient et
vont encore s’alléger en baie d’Along, ou bien ils y attendent dans un
mouillage parfait, parfois plusieurs jours, que la marée leur permette de
passer la barre du Song-Koï pour pénétrer à Haï-Phong.
A noter encore qu’un canal
existait déjà, faisant communiquer la baie avec le Fleuve Rouge en passant bien
à l’abri par Quang-Yen, préfecture annamite.
Les profondeurs de la baie
d’Along sont réputées comme abritant encore des espèces de poissons disparues
ailleurs, de monstres préhistoriques. Le fameux serpent de mer y aurait fait
diverses apparitions.
J’étais à Hanoï, en mars
1900 l’hôte du Gouverneur général lorsqu’il reçut un télégramme du commandant
de la « Surprise », alors
en mission hydrographique dans la baie d’Along, annonçant que le serpent de mer
venait d’être rencontré par son bateau. Ce lieutenant de vaisseau envoyait
ensuite un rapport circonstancié sur sa rencontre, avec les attestations de
plusieurs membres de son équipage de l’apparition sur un bord de la « Surprise » de plusieurs anneaux
d’un monstre à forme de serpent paraissant avoir près de deux mètres de
diamètre. L’animal avait encore été vu sur l’autre bord comme s’il avait plongé
sous le bateau.
J’ai eu l’occasion,
quelques jours plus tard, de causer avec cet officier de cet événement
sensationnel ; il me conta que, antérieurement, fouillant, comme sa
mission lui en donnait la facilité, tous les recoins de l’immense baie, il
avait pénétré à marée basse dans une des grottes envahies par la mer, et là il
aurait vu, allongés sur les rochers, deux monstres dont les formes, autant que
la faible lumière les laissait distinguer, rappelaient celles données par les
indigènes au Dragon. Serait-ce quelques survivants des ichtyosaures ?
Il faut ajouter que les
camarades de ce lieutenant de vaisseau ne considéraient pas ses récits comme
méritant une créance absolue, et le jugeaient marin de Marseille plutôt que de Toulon.
Un coin de la baie d’Along où les vapeurs
viennent mouiller.
Auguste François
Dernière mise à jour : 15 mars 2016